Réputé pour sa stabilité, le franc suisse a pris de la vigueur suite à l’annonce de la dissolution en France. Toutefois, la Banque nationale suisse (BNS), qui a récemment réduit son taux de 1,5 % à 1,25 %, pourrait intervenir sur le marché pour éviter une flambée excessive du franc en cas de chaos politique.
La BNS a abaissé son taux de 25 points de base à 1,25 % dans un climat tendu à ses frontières. Ce geste préventif intervient alors que l’économie suisse reste relativement stable (inflation, chômage, croissance, risques financiers). Cependant, une crise européenne pourrait aussi affecter la Suisse.
Éloignée des turbulences politiques françaises, la Suisse bénéficie d’une grande stabilité institutionnelle, d’une meilleure note de crédit et de perspectives de croissance plus favorables cette année : 1,3 % contre 0,7 % selon le FMI. La Suisse jouit également de l’une des inflations les plus faibles parmi les grandes économies, à 1,4 % en mai sur un an, contre 2,6 % dans la zone euro et 3,3 % aux États-Unis.
En mars, la BNS avait anticipé les autres grandes banques centrales en abaissant ses taux d’intérêt de 25 points de base à 1,5 %. La BCE n’a baissé les siens qu’en juin, tandis que la Réserve fédérale n’a pas encore agi. Cette baisse précoce des taux a fait chuter le taux de change réel de la monnaie suisse de près de 5 % cette année. Le franc suisse a perdu 2,2 % face à l’euro, 5 % par rapport au dollar et à la livre sterling. Cette dépréciation est une bonne nouvelle pour les exportateurs suisses, souvent pénalisés par un franc fort.
Le franc suisse, Champion des devises refuge
Le franc suisse, champion des devises refuge, profite actuellement de la crise politique en France et de ses répercussions sur la zone euro. Depuis l’annonce de la dissolution par Emmanuel Macron, l’euro a perdu près de 2 % face au franc, se situant maintenant à 0,9550 franc, soit seulement à 3 % de son plus bas historique de 0,9288 franc atteint le 29 décembre 2023. Une chute vers ce niveau est possible en raison des tensions sur les marchés provoquées par les législatives françaises.
La BNS pourrait intervenir pour freiner un rebond excessif de sa devise, qui tend à s’apprécier en temps de crise. En 2008, le franc suisse avait bondi de 8,5 % lors de la crise financière, et de 24 % lors de la crise de la zone euro entre 2010 et l’été 2011, atteignant un record en août 2011. En septembre 2011, la BNS avait instauré un cours plancher de 1,20 franc par euro pour limiter l’appréciation du franc. La BNS a une longue histoire d’interventions pour affaiblir sa monnaie, vendant 133 milliards de francs en 2023 contre 22 milliards l’année précédente.
Cette année, la dépréciation du franc suisse a été le fait des marchés, notamment des hedge funds, qui ont massivement vendu la devise. Sur le Chicago Mercantile Exchange, les positions spéculatives à la baisse sur le franc suisse sont deux fois plus importantes que les achats. Les traders américains sont plus prudents sur l’euro malgré la crise politique en France, estimant son potentiel de baisse limité face au franc et au dollar, tous deux surévalués de 7 % à 15 % selon la Deutsche Bank.