En trois mois, l’action Kering a gagné 50 %. À peine nommé, Luca De Meo redonne espoir aux investisseurs. Mais derrière l’effet d’annonce, le vrai test n’a pas encore commencé.

Le 15 septembre, Luca De Meo a officiellement pris la tête de Kering. Trois mois plus tôt, l’annonce de sa nomination avait suffi à réveiller un titre en chute libre. Résultat : +50 % en Bourse, une des plus fortes hausses du CAC 40. Un actionnaire l’a résumé avec des mots pleins d’espoir : “Luca de Meo, faites que l’action Kering soit plus attractive et plus désirable que jamais”.
L’ancien patron de Renault promet un style “rapide, efficace, décisif”. Il entend présenter son plan stratégique au printemps 2026, mais assure déjà qu’il n’attendra pas pour agir. Dès son arrivée, il a placé Francesca Bellettini à la tête de Gucci et noué un partenariat renforcé avec Valentino. Une approche saluée par Jie Zhang (Alphavalue) : “Bien que ces mesures aient un impact quantitatif limité à court terme, elles envoient un signal fort : de Meo agit de manière décisive”.
Entre storytelling et prudence analytique
Le storytelling autour de De Meo séduit, notamment grâce à la série documentaire sur sa “Renaulution”, que plusieurs analystes disent avoir regardée. Certains voient déjà dans sa rigueur industrielle la recette d’un redressement stratégique. Pour d’autres, l’optimisme va trop vite. Chez RBC, Piral Dadhania tempère : “Bien que la nomination d’un nouveau PDG externe, reconnu et respecté, soit encourageante, nous ne nous attendons pas à une solution immédiate”.
Même tonalité chez Bernstein : “Kering ne devrait pas faire exception. Le cours de l’action a déjà progressé de 50 % par rapport à ses récents creux. Et la société n’a encore montré aucune amélioration tangible”. Pour eux, la trajectoire sera faite de hauts et de bas. Le redressement de Gucci, dont les ventes ont chuté de 25 % au premier semestre, reste à concrétiser.
Gucci : le vrai test commence au printemps
La première collection de Demna Gvasalia pour Gucci, attendue à Milan en février, sera scrutée de près. Elle devrait marquer un tournant stylistique après des années d’instabilité créative. “Il y a un potentiel énorme s’ils parviennent à trouver le bon équilibre entre création et offre produit”, estime John San Marco de Neuberger Berman.
Mais les résultats de Gucci ne devraient pas s’améliorer avant mi-2026. HSBC, UBS et Bloomberg s’accordent sur un trimestre difficile à venir. Pour Anne-Laure Bismuth (HSBC), “Nous estimons que la nouvelle direction bénéficiera d’un sursis”. Flavio Cereda (GAM UK Ltd.) se montre plus réservé : “Ce n’est qu’à partir du printemps prochain que nous pourrons en mesurer l’impact réel”.
Malgré les incertitudes, Jelena Sokolova (Morningstar) conserve une vision de long terme : “Gucci devrait être en mesure de regagner, à long terme, son pouvoir de fixation des prix et son attractivité”.
Kering devra désormais convaincre au-delà des annonces. Et montrer que la magie de Luca De Meo peut opérer… dans l’univers impitoyable du luxe.