Offres concurrentes et surenchères en matière d’offre publique : une occasion ratée sur Believe ?

Par Thomas Hornus, associé chez EuroLand Corporate

Dans le monde des marchés financiers, les offres concurrentes et les surenchères sont des stratégies essentielles pour les entreprises désireuses de prendre le contrôle d’une société cible cotée en bourse. Ces processus, réglementés de près par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF), offrent un terrain de jeu complexe où les acteurs tentent de maximiser la valeur pour leurs actionnaires tout en naviguant à travers les règles strictes de l’acquisition.

Quelques fondements réglementaires

Selon les articles 232-5 à 232-13 du règlement général de l’AMF, l’ouverture d’une offre concurrente est soumise à un calendrier précis : un projet d’offre concurrente peut être déposé jusqu’à cinq jours de négociation avant la date de clôture de l’offre initiale. De même, l’initiateur de l’offre initiale a la possibilité de surenchérir jusqu’à cinq jours de négociation avant la clôture de l’offre.

L’AMF joue un rôle décisif dans l’évaluation de ces offres concurrentes et surenchères. Pour être déclarée conforme, une offre concurrente doit généralement proposer un prix supérieur d’au moins 2 % à l’offre précédente. Cependant, dans certains cas, une offre peut être considérée comme conforme si elle offre une amélioration significative par rapport à l’offre précédente, même sans augmentation de prix. Ce peut être le cas notamment lorsque l’offre concurrente ou la surenchère supprime ou abaisse le seuil de réussite en dessous duquel l’offre serait annulée.

Une offre publique concurrente est ouverte dans les mêmes conditions qu’une offre publique initiale. L’AMF en arrête le calendrier et aligne les dates de clôture des offres en présence sur la date la plus lointaine.

L’ouverture d’une offre concurrente rend nuls et non avenus les ordres de présentation des titres en réponse à l’offre antérieure.

L’initiateur de l’offre publique initiale dispose de la possibilité de renoncer à son offre dans les cinq jours de bourse qui suivent la publication du calendrier de l’offre concurrente.

Believe : une illustration pratique avortée

Pour rappel, un consortium dirigé par Denis Ladegaillerie fondateur et directeur général de la société, EQT et TCV (entreprises d’investissement de premier plan) a manifesté, le 12 février 2024, son intention d’acquérir, sous condition suspensive d’un avis favorable du conseil d’administration de Believe sur le projet d’offre, un bloc majoritaire représentant environ 72% du capital et 77% des droits de vote de Believe à un prix de 15€ par action, offrant une prime significative par rapport aux cours précédents.

Cette offre a été rapidement challengée par Warner Music Group (WMG), qui a exprimé le 27 février 2024, une potentielle marque d’intérêt pour Believe à un prix substantiellement plus élevé de minimum 17€ par action. La position de WMG ouvrait ainsi la voie à une possible confrontation d’offres et de surenchères.

La situation a pris un tour inhabituel lorsque le consortium initial a renoncé à la condition d’avis favorable du conseil d’administration de Believe, déclenchant ainsi un débat sur la conformité réglementaire de cette action. Le collège de l’AMF, dans sa séance du 22 mars 2024, a souligné l’importance de cette condition et a jeté un éclairage sur les principes régissant les offres publiques.

Suite à cette position, Believe a invité WMG à soumettre une offre engageante, ouvrant ainsi la porte à une nouvelle phase de négociations et de confrontations.

Finalement, le 6 avril dernier, WMG a annoncé par communiqué de presse sa décision de ne pas soumettre d’offre pour le groupe Believe. La bataille pour Believe n’aura donc pas lieu, tout du moins pas avec WMG et pas au titre des offres publiques concurrentes et des surenchères.

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